mardi 19 juin 2012

Nouveau blog : La chevauchée du cinéphile !


Ce blog n'est plus mis à jour depuis quelques temps maintenant, mais j'ai décidé de créer une nouvelle plateforme de critiques, moins rigide, sur Wordpress. Je vous invite donc dès maintenant à me retrouver sur

dimanche 23 janvier 2011

Marty (1955)


MARTY
Réalisateur : Delbert Mann
Scénario : Paddy Chayefsky
Avec : Ernest Borgnine, Betsy Blair, Esther Minciotti

Marty, un boucher trentenaire d'origine italienne, vit avec sa mère envahissante et peine à trouver l'amour alors que son frère va se marier. Un soir de bal, il rencontre une femme, Clara, délaissée par le garçon qui l'accompagnait, et passe la nuit à parler avec elle. Ils décident de se revoir.

Originalité : 7/10
Scénario : 7/10
Musique : 6/10
Interprétation : 8/10
Mise en scène :6/10
>> Note globale : 6.8/10

Palme d'or à Cannes et Oscar du Meilleur film. Chaque période de l'Histoire connaît des troubles, tout le monde fait peut faire des erreurs. Que vient donc faire ce gentil petit film parmi les records de récompenses du cinéma ? Personne, probablement, ne saura jamais y répondre. Dans un ton très social (les relations entre membres d'une famille d'origine italienne, les relations avec les autres), cette comédie permet toutefois d'apprécier - encore une fois, je ne cesserai de le répéter - le grand talent de Ernest Borgnine, dans un rôle émouvant, simple, loin des méchants et gros durs qu'il interpréta régulièrement. Maniant avec talent un texte au rythme parfois haletant (les discussions sur sa vie avec Clara), il parvient également à jouer avec une grande justesse la gentillesse (lui que l'on a plutôt l'habitude de voir en salaud, voleur, barbare ...).

Outre cela, les quelques scènes amusantes et les dialogues soignés, rien de transcendant. On cherche à tout moment ce qui a fait entrer ce film dans la légende, mais on ne trouve rien, sinon la sincérité du propos, la mise en scène entièrement dévouée à son histoire, sans éclats. Certains moments sont même à la limite de l'ennuyant et la fin, logique mais pourtant très artificielle, nous laisse perplexes. Film agréable et divertissant, on passe un joli moment devant les aventures sentimentales de Marty. Mais on n'en redemande pas.

samedi 22 janvier 2011

L'homme de nulle part (1956)


L'HOMME DE NULLE PART (Jubal)
Réalisateur : Delmer Daves
Scénario : Delmer Daves et Russell S. Hughes
Avec : Glenn Ford, Ernest Borgnine, Rod Steiger, Charles Bronson

Jubal est recueilli blessé par un fermier, Shep, qui l'engage avec lui. Ses charmes ne laissent pas indifférente la femme de Shep. Les ennuis semblent inévitables.

Originalité : 8/10
Scénario : 8/10
Musique : 7/10
Interprétation : 8/10
Mise en scène : 9/10
>> Note globale : 8/10

L'homme de nulle part est un western tout à fait remarquable, de par l'interprétation, la mise en scène et le traitement de son idée de départ, fort simple et déjà connue (notamment chez Anthony Mann) : un homme seul, au passé plus ou moins trouble et toujours mystérieux (ici, même en le dévoilant, le personnage ne nous apprend rien) arrive dans une communauté où il a du mal à être accepté de tous. Il y a toujours une femme, belle et désirable, au milieu de tous ces hommes, rivalisant de pouvoir et de virilité. Delmer Daves nous conte cette histoire pendant une bonne partie du film, prenant son temps à montrer l'évolution des relations entre les personnages, la montée des tensions entre certains devenant si forte qu'on n'attend que le moment où elles vont enfin exploser. Il arrive, calmement, dans une superbe séquence décomposée en trois scènes où brille particulièrement Ernest Borgnine. Et la belle mécanique qui fonctionne depuis le début se met en marche à toute allure, l'homme venu de nulle part devenant au premier prétexte venu, une cible, la cible de tous. La foule, la meute, ne fait plus qu'une, représentant ce que l'homme a de plus mauvais en lui. Elle fait ressortir son côté animal, montre que les hommes se combattent toujours entre eux. Le dénouement final se joue évidemment à presque rien, à un détail, qui fait que l'homme reconnaît son erreur et ne condamne pas un innocent. Ces représentations de la folie humaine et de l'idée de justice reviennent toujours dans les westerns de Daves (La dernière caravane, 3h10 pour Yuma, La colline des potences - qui reprend à peu près la même trame, et les mêmes conséquences, en pire).

Cette histoire aurait pu faire un très bon Film Noir, l'originalité vient du fait qu'elle est transposée dans l'Ouest sauvage. Sauvage par ses paysages, somptueusement filmés (Daves utilise des décors naturels), sa nature, ses étendues immenses. Car l'homme, lui, l'est de moins en moins a priori : les ranchs et les barbelés annoncent la propriété individuelle, la fin de la conquête de l'Ouest, la justice et les lois. Pourtant l'histoire n'est pas datée, et ne fait en rien référence à une quelconque allusion historique. Perdus au milieu de nulle part, rien ne peut retenir ces hommes de se dévorer entre eux. La mise en scène est maîtrisée de bout en bout, avec dans ce film plus particulièrement, une intensité dramatique très forte, remarquablement filmée (les allusions de Steiger à son patron lors d'un campement, la désillusion de Borgnine dans sa propre chambre, son arrivée dans le saloon, la sortie de Ford devant les cavaliers) et qui s'adapte au propos : les travellings sont privilégiés aux plans de grue, et rendent les scènes très marquantes (le mouvement de caméra partant du dos de Glenn Ford pour arriver sur le fusil de Ernest Borgnine).

Mais la particularité de Delmer Daves est également dans le traitement de son histoire, de ses personnages. James Stewart chez Anthony Mann finit toujours par se perdre momentanément dans la colère, dans la vengeance, dans la violence. On ressent chez Daves de la compassion pour les hommes dont il montre les faiblesses. Ainsi, Glenn Ford ne tombe jamais dans la violence ou la vengeance, il reste en retrait, fier (tout comme Van Heflin dans 3h10 pour Yuma ou Gary Cooper dans La colline des potences). La violence elle-même n'est pas montrée, à l'image de ce superbe mouvement de caméra partant des hommes tournant comme des loups autour de leur proie, qu'ils vont lyncher, et finissant sur un crochet suspendu à l'entrée de la grange. Car il y aura tout de même un lynchage - l'homme est ainsi fait - plus juste celui-là, presque mérité. Mais Daves, pour montrer son optimiste ou masquer son pessimisme, préfère terminer sur un plan heureux, où l'homme bon part se confondre avec le paysage. Cela peut faire démodé aujourd'hui. J'y vois personnellement une très grande leçon de cinéma, donnée modestement et avec talent par un metteur en scène hors pair.

vendredi 21 janvier 2011

Pour elle (2008)


POUR ELLE
Réalisateur : Fred Cavayé
Scénario : Fred Cavayé et Guillaume Lemans
Avec : Vincent Lindon, Diane Kruger, Olivier Marshal, Rémi Martin

Lisa et Julien sont mariés et mènent une vie heureuse et sans histoire avec leur fils, Oscar. Mais leur vie bascule quand un matin, la police vient arrêter Lisa pour meurtre. Elle est condamnée à 20 ans de prison. Trois ans plus tard, elle tente de se suicider. Julien, par amour, décide de la faire évader.

Originalité : 8/10
Scénario : 8/10
Musique : 7/10
Interprétation : 8/10
Mise en scène : 8/10
>> Note globale : 7.8/10

Premier film et première grande réussite, de bout en bout. Impressionnants de maîtrise, la mise en scène et le scénario sont d'une efficacité rare dans ce genre de film, en France. On est habitué au convenu, au fade, au pathos facile et au dénouement pour ménagère assidue de la première chaîne nationale. Il n'en est rien ici, les dix premières minutes, mystérieuses, avec une économie de dialogues, étant assez intrigantes pour que l'on rentre immédiatement dans le vif de l'action. Les ellipses diverses viennent éviter avec justesse des scènes explicatives pénibles, et tout se joue souvent dans les regards. Ces scènes silencieuses sont d'ailleurs la plupart du temps très marquantes (Diane Kruger qui dit 'Je t'aime' sans que l'on puisse l'entendre, à travers l'ouverture de la porte du parloir, ou l'échange de regards entre Vincent Lindon et son père, qui a compris).

Les acteurs, principaux arguments du film, sont d'une grande justesse, y compris chez les seconds rôles (Rémi Martin, Moussa Maaskri, Olivier Marshal pourtant souvent caricatural). Le film se montre sans compassion, et brouille régulièrement les pistes (la mort du jeune trafiquant est inattendue). Noir, violent parfois, amoral souvent, Pour elle s'attaque pourtant à un sujet déjà bien exploité : que peut-on faire par amour ? jusqu'où peut-on aller ? Les jolies réussites ne sont pas légion, surtout dans le cinéma français. Plus réaliste qu'un DiCaprio sur un paquebot qui coule, mais moins drôle qu'un Benigni dans un camp de concentration, le premier long métrage de Fred Cavayé a de beaux jours devant lui, son auteur aussi probablement.

mardi 18 janvier 2011

Règlement de comptes (1953)


RÈGLEMENT DE COMPTES (The Big Heat)
Réalisateur : Fritz Lang
Scénario : Sydney Boehm
Avec : Glenn Ford, Gloria Grahame, Lee Marvin, Jocelyn Brando

Le policier Dave Bannion enquête sur le mystérieux suicide d'un collègue, et semble être le seul à ne pas croire aux raisons invoquées. Sa volonté d'éclaircir cette affaire met très vite en jeu sa vie, et celle de ses proches.

Originalité : 7/10
Scénario : 8/10
Musique : 7/10
Interprétation : 8/10
Mise en scène : 8/10
>> Note globale : 7.6/10

Basé sur une histoire très simple (un flic veut résoudre une enquête qu'il juge bâclée), Règlement de comptes est l'un des derniers films réalisés par Fritz Lang aux États-Unis. Le ton est donné dès l'ouverture, montrant de manière brutale le suicide d'un homme, et l'arrivée de son épouse, silencieuse. Quelques coups de téléphone et la présentation furtive des personnages nous entrainent directement dans l'intrigue, précise, à l'image de la superbe horloge qui apparaît dans les premiers plans.

Le film ne révolutionne pas le Film Noir mais va tout de même plus loin que les modèles du genre, apportant une violence plus montrée, plus crue. Fritz Lang filme ainsi un homme qui se tire une balle dans la tête, Lee Marvin qui, dans un accès de fureur, jette violemment du café brûlant au visage de sa compagne. La mécanique enclenchée dès l'ouverture pousse le policier entêté dans ses retranchements, notamment quand il s'apprête, en gros plan, impressionnant (d'autant plus qu'il s'agit de Glenn Ford !), à assassiner un tueur à gages et même une femme ! Le rôles des femmes justement est important puisque ce sont elles qui font avancer l'histoire, de manière plus ou moins volontaire. Dans une très belle séquence de confrontation, Lang rend hommage en quelque sorte aux femmes de gangsters, souvent potiches, mais essentielles, et on en retient cette phrase "Nous sommes les mêmes vous et moi. Nous sommes les femmes sous les manteaux de vison."

Mais plus qu'un film de femmes, Règlement de comptes est aussi, comme souvent chez Fritz Lang, l'histoire d'un homme seul, perdu, face aux puissants (ses supérieurs, les politiciens). Mais on sent que celui-là est sur le fil, en permanence, prêt à passer de l'autre côté de la barrière et à se comporter comme ceux qu'il traque. Original sur ce point, le film annonce les polars et personnages célèbres (Le justicier dans la ville, l'inspecteur Harry) des décennies suivante, tout en retenue et en classe.

Brigadoon (1954)


BRIGADOON
Réalisateur : Vincente Minnelli
Scénario : Alan Jay Lerner
Avec : Gene Kelly, Cyd Charisse, Van Johnson, Barry Jones

Lors d'un voyage en Écosse, deux amis partis chasser se perdent dans la forêt. Surpris de ne pas le voir apparaître sur leur carte, ils arrivent dans un petit village, Brigadoon, où les habitants semblent assez hostiles. Et pour cause, ils n'ont jamais vu le moindre étranger. Pourtant, puisque c'est jour de noce, le futur marié invitent les deux amis à rester un moment.

Originalité : 8/10
Scénario : 7/10
Musique : 7/10
Interprétation : 7/10
Mise en scène : 8/10
>> Note globale : 7.4/10

Quelle belle curiosité que voilà ! Brigadoon, une comédie musicale teintée de fantastique, mise en scène par un des spécialistes du genre, Vincente Minnelli, et interprétée par deux stars, Gene Kelly et Cyd Charisse, au mieux de leur forme. Comment ne pas succomber au charme dès les premiers plans, noyés dans la brume épaisse d'une forêt d'Écosse ? Toute les séquences d'ouverture sont formidablement intrigantes, comme sorties d'un rêve, chanté et dansé bien entendu. On ne s'attend guère à trouver le héros très "urbain" de Chantons sous la pluie, Un jour à New-York ou Un américain à Paris dans cette verdure européenne.

Le film est par la suite beaucoup plus inégal. Si on prend un plaisir jouissif à regarder et écouter la séquence sur la place (I'll go home with Jean), agrémentée de quelques claquettes sans éclats, les scènes qui suivent sont plus conventionnelles, parfois datées, à l'image de cette balade amoureuse à la recherche de fougères. Heureusement, plusieurs morceaux assez lourds sont contrebalancés par des clins d'œils visuels comiques (où Gene Kelly chante son amour à une vache ou un porc par exemple, ou bien quand Cyd Charisse improvise une danse avec une amie déguisée en homme). Gene Kelly aurait voulu tourner en décors naturels, la production refusa. Ainsi, on se retrouve avec un magnifique décor hollywoodien, très réussi d'ailleurs, confortant un peu plus l'idée de l'imaginaire. Le point culminant - et probablement le plus réussi - du film est la traque d'un habitant cherchant à s'enfuir, dans la nuit brumeuse. Utilisant avec talent le cinémascope et le plan-séquence, Minnelli réalise une séquence magnifiquement orchestrée, esthétiquement superbe, dotée d'une très belle musique, oppressante, assez unique dans ce genre de films.

Brigadoon m'a semblé assez pessimiste dans son ensemble, et il aurait gagné en insolence à pousser sa noirceur jusqu'au dénouement final qui, ici, reste assez sage et convenu. Et pourtant ce n'est pas faute d'avoir essayé. Gene Kelly trouve l'amour en la personne d'une femme parfaite à tous points de vue vivant dans un village fantôme, donc dans un rêve. L'idée du film sur l'image de la femme rêvée est assez explicite et sort là totalement du conventionnel. On apprécie aussi le personnage de Van Johnson, très drôle, très cynique, incarnant la représentation du côté cartésien, réaliste - et finalement assez triste - du personnage de Gene Kelly qui, malgré tout, reste un citadin, engagé auprès d'une femme pénible et matérialiste (mais bien réelle celle-là !), vivant dans une réalité pas toujours très drôle. En cela, la séquence à New-York est très belle, là encore assez originale dans une comédie musicale des années 50 - en plus d'être très bien mise en scène. Mieux écrit, mieux rythmé, le film aurait pu devenir un chef d'œuvre. Il n'en reste pas moins très beau, et très appréciable à différents niveaux. Néanmoins, il reste à conseiller, je pense, aux amateurs du genre.

lundi 17 janvier 2011

French Cancan (1955)


FRENCH CANCAN
Réalisateur : Jean Renoir
Scénario : Jean Renoir
Avec : Jean Gabin, Françoise Arnoul, Maria Felix, Philippe Clay

Danglard, entrepreneur de spectacles, se lance dans la rénovation d'un vieil établissement qu'il nomme le Moulin Rouge. Il prend le pari de remettre à la mode un vieux quadrille, le cancan, et de faire de Nini, jeune blanchisseuse, une danseuse vedette. Dans son projet, Danglard se heurte à la jalousie de Lola, danseuse éprise de lui, aux revirements de son commanditaire et aux souteneurs de Montmartre.

Originalité : 8/10
Scénario : 8/10
Musique : 9/10
Interprétation : 8/10
Mise en scène : 9/10
>> Note globale : 8.4/10

Gabin, Renoir, Montmartre  ... ça sent si bon la France ! Quel plaisir pour moi de découvrir ce classique du cinéma français dans une superbe version restaurée, mettant ainsi encore plus en valeur le génial travail orchestré à tous les niveaux de main de maître par Jean Renoir. Sa mise en scène, notamment sur la dernière demi-heure du film, reste époustouflante de maîtrise et de savoir-faire. La photographie (signée Michel Kelber) est l'une des plus belles que j'ai pu admirer dans un film français de cette époque, on se croirait dans un tableau ... de Renoir !

Jean Gabin est l'incarnation idéale de Danglard (il est à mon sens celui qui, dans le cinéma français, pouvait le mieux passer du voyou à l'aristocrate, et réciproquement) et en impose du début à la fin, débitant avec le plus grand naturel un dialogue très étudié, l'argot du faubourg se mêlant avec le langage plus soutenu des classes aisées. Le film aborde plusieurs thèmes, des relations entre classes sociales (avec une scène magnifique dans un troquet, au début), aux relations au sein même des classes, tout en dressant un portrait peu reluisant - mais plein d'honneur tout de même - du monde du spectacle. Quelle majesté possède Gabin tapant du pied en coulisses pendant le show ! Tout a déjà été dit sur ce chef d'œuvre, m'étaler d'avantage serait de la prétention.